En réponse à “Que va devenir le Mouvement Démocrate ? (1)”

(sur le Club des Démocrates)

Comme pas mal d’autres nouveaux adhérents ou assimilés, l’auteur de cette contribution a tout compris. Oui, il y a une dualité culturelle dans le Mouvement Démocrate, profonde. Mais il n’a rien compris, en même temps. Cette dualité existe dans quasiment toutes les organisations politiques. Et elle existe aussi à l’échelle du pays, et ailleurs. C’est la dualité du monde civique et du monde politique.

La particularité du Mouvement Démocrate, c’est d’avoir prétendu y reconnaître une question cruciale pour la démocratie, c’est d’avoir prétendu vouloir changer quelque chose aux rapports de ces deux mondes, et c’est avoir mis en pratique exactement l’inverse dans son processus de fondation, en portant à son comble la distance hiérarchique entre eux, et la division du travail entre eux (tout le pouvoir d’un côté, toute la responsabilité de l’autre), et cela par les procédés les plus classiques de l’encadrement et du contrôle des organisations politiques.

Cette particularité le plonge dans un état de crise permanente et d’incapacité stratégique. Que d’autres partis connaissent, mais en moins exacerbé. Pour sortir de la crise, il faudrait rompre un consensus illusoire, mais solide, jusqu’à présent : l’accord sur le discours de Bayrou aux présidentielles. Il faudrait comprendre l’ambivalence de ce discours, interprété de deux manières incompatibles par la culture centrée sur le mandat public et par la culture centrée sur l’engagement citoyen.

Cela dit, moyennant cet effort de rupture, on se retrouverait dans les conditions d’une expérience intéressante : celles d’une alliance à négocier, celles d’une confédération à construire. Il faut bien constater d’au dehors, ces deux mondes sont en négociation, et parviennent à des compromis. Boîteux, éphémères, mais réels.

Certains de ces compromis, comme la laïcité, sont d’ailleurs plutôt réussis et durables. Il n’y a donc pas d’incompatibilités idéologiques, il me semble.

Par ailleurs, je crois qu’il faut reconnaître la nécessité du monde politique, qui a ses valeurs, ses grandeurs, ses capacités, sa culture, ses jeux. Jeux qu’il faut connaître à fond, et pratiquer en cas de besoin. Même si ce qui reste de l’UDF n’a pas représenté très dignement tout cela jusqu’ici. Si ces deux mondes et ces deux cultures trouvent un jour le moyen de travailler ensemble (et non l’un pour l’autre), ils constitueront une force immense, capable de bouleverser complètement le paysage politique de notre pays.

Mais de fait accompli en fait accompli, l’UDF, obsédée depuis le début par l’encadrement des nouveaux adhérents, a trop bien réussi. Le potentiel stratégique du Mouvement est aujourd’hui nul, irréversiblement. Ses statuts, ceux d’un parti classique, ne lui permettre pas d’autre voie que le populisme fusionnel, dans le sillage de son leader.

Seule une scission pourra rétablir les conditions de départ, celles qui ont provoqué l’afflux des adhésions, mais en mettant cette fois les nouveaux adhérents en position de négocier la suite. Quand se produira-t-elle ? Cela va dépendre du temps qu’il faudra pour faire comprendre, par exemple, en quoi la fusion participative était un processus manipulatoire, et comment ce processus s’est nourri de l’auto-persuasion des nouveaux adhérents. Ou bien du temps qu’il faudra pour découvrir l’inconsistance de notre consensus de départ.

On met du temps à reconnaître qu’on s’est trompé. Voir :

http://www.club-des-democrates.fr/spip.php ?article23

Cette scission peut se produire comme une alternative au renouvellement des adhésions, à partir de mai prochain, ou plus tard, vers la fin de l’année, ou bien encore plus tard. Bref, elle gagne chaque jour en probabilité. Lentement, mais surement.

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