Pour le traitement continu d’un risque résiduel

 (Sur AgoraVox, en réponse à Bluelight, sous “Pourquoi Bayrou et le MoDem ne sont pas morts“)

Nous sommes nombreux à avoir fait notre choix bien avant l’embourbement télévisuel de Bayrou ou la diffusion du film de Yann Arthus Bertrand. Selon le dernier sondage TNS Sofres fait avant ces événements, paru le 5 juin, les intentions de votes en faveur de la liste menée par Cohn Bendit se situaient à 15,5%, et le MoDem à 12,5%. Europe Ecologie n’a donc gagné que 0,78% de voix dans les derniers jours. Mais surtout : ce que le MoDem a perdu dans les derniers jours (non pas “8%”, comme Bayrou s’en flatte tristement, mais 4%), il ne l’a pas perdu au profit de la liste Europe Ecologie.

Les interprétations paranoïdes de Bayrou sont dépourvues de fondement. Il ne peut s’en prendre qu’à lui-même. Bayrou, pour se rapprocher de son score aux présidentielles, devait tenir compte de la forte proportion de voix qui lui sont venues de ceux qui avaient voté non au référendum de 2005, et qui ont été séduit, en 2007, par son discours contre les élites et pour la démocratisation de la politique. D’où l’ambivalence et la mollesse de ses propositions européennes. La dénonciation du “plan” sarkoziste, l’incarnation de premier opposant (non homologuée), et le refuge dans la défense des “valeurs” lui ont semblé être les seuls moyens de “faire le plein”. Il a grandement sous-estimé la frustration d’une autre part de ce plein : l’électorat des Verts ( Dominique Voynet à obtenu moins de 2% des voix aux présidentielles).

Ce marketing personnaliste, appliqué à la concurrence écologique, ne fourni quasiment aucune prise, aucun argument. D’où les accusations minables de Bayrou au sujets des visites de Cohn Bendit à l’Elysée. La droite et la gauche complotent ensemble contre lui ? Il se trouve que Bayrou a ridiculement rendez-vous avec Sarkozy aujourd’hui, à 17 h. Pour quel complot ?

On peut, à condition d’adopter la voie du populisme intégral, parvenir au second tour des présidentielles sans le soutien d’un grand parti. Le Pen en a donné une démonstration mémorable en 2002.  C’est pourquoi il convient d’être vigilant à l’égard de Bayrou. A chaque échec du MoDem, la  tentation populiste risque de prendre définitivement le dessus.

Le populisme intégral ne connaît ni droite, ni gauche, ni centre. Il est fait d’une relation directe entre un meneur et ceux qui lui font confiance ou ont foi en lui. Au second tour, en 2002, tout le monde a compris l’enjeu. Mais Bayrou, avec son extrême centre tout neuf, n’est pas Le Pen, héritier de toute l’histoire de l’extrême droite. Dans l’hypothèse peu probable d’un Bayrou recyclé, resublimé et recharismatique parvenu au second tour en 2012, le choix serait moins facile, pour beaucoup de gens.

C’est pourquoi, à titre préventif, il faut, comme au football, continuer le marquage de Bayrou. Quitte à fournir un semblant de nourriture à son sentiment de persécution.

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