Médias (suite)

Oui, tu as raison, prenons cet exemple.

1. Le cas décrit par Etoile66 est simple. Ou bien le contenu de son premier message a provoqué sa censure, ou bien il a disparu pour des raisons techniques. Il suffirait sans doute de le lire pour trancher. Et comme les trois suivants évoquaient tous cette censure, ils ont été censurés. Pour le second message, l’accusation était peut-être même injustifiée. L’accusation de censure est perçue à juste titre comme nocive par la

censure. Le rôle habituel de la censure est de veiller à des intérêts d’éditeur, sur des critères juridique (insulte, diffamation, incitation à la haine, apologie du crime, obscénité, etc.). Mais l’espace offert aux lecteurs par un journal comme le Nouvel Obs n’est pas neutre. L’hospitalité qu’il offre est conditionnelle. Elle est surveillée en permanence. C’est normal. Il reste pourtant assez facile, quand on n’est pas aux extrêmes, de remplir ces conditions d’hospitalité, tout en restant très efficace en terme d’argumentation. S’il faut se former à cela, faisons-le.

Ce qui est surprenant, donc, ce n’est pas le sort de ces messages successifs. Il se peut même que leur traitement, à partir de l’adresse IP d’origine, soit désormais entièrement automatisé. Ce qui mérite de s’interroger, c’est l’interprétation de cette situation comme la manifestation d’une volonté de priver les membres du Mouvement Démocrate d’accès aux médias. Il y a amplification, distorsion, dramatisation, systématisation, subjectivation (ce dernier terme, pas très approprié, pour dire, faute de mieux, qu’on interprète un phénomène comme centré sur soi).

Tout cela peut se décrire comme un sentiment diffus et collectif de persécution, d’exclusion, de discrimination. Il se nourrit d’une interprétation fausse de certaines réactions. Laquelle, très souvent, provoque ensuite des réactions conformes au modèle interprétatif initial. Il y a là un mécanisme extrêmement dangereux de renforcement et même “d’auto-réalisation”, si tu vois ce que je veux dire. A mon avis, dans cet exemple, c’est cet aspect de la question qui domine.

2. Jean François Kahn a préféré prendre la question sous d’autres angles, qui montrent qu’il existe bien des tendances objectives qui nous sont défavorables dans la transformation du champ médiatique. Mais pas des tendances concertées et pourvues d’une intention unique de s’en prendre à nous, faut-il le préciser ? Les conditions sont défavorables, du fait d’une proximité renforcée par des liens économiques forts entre le pouvoir politique et certains groupes détenteurs de médias et fournisseurs de l’état, par exemple. Là aussi, la stratégie à adopter comporte une dimension cruciale de formation. Jean François Kahn a aussi beaucoup parler du journaliste, de sa position particulière dans ce système. Je passe, puisqu’Etoile66 nous a trouvé le lien (merci à elle).

3. Et puis il y a les manoeuvres hostiles. Caractérisées. Comme celle du Monde à la veille du congrès. Tout ce que j’ai dit jusqu’ici n’avait pas pour but de nier l’existence de ce type d’agression. Au contraire, cela doit nous intéresser particulièrement. Et nous devons bien évidement prévenir ces attaques, s’y préparer, les détecter au plus tôt, riposter avec des moyens adaptés, ce qui demande de l’organisation. L’amendement sur les moyens participatifs décrivait un Réseau de Conseil et de Soutien capable de surveillance, d’alerte (pôle de veille et pôle d’organisation) et de réaction (pôle communication et pôle stratégie).

Difficile de réagir, si l’on ne parvient pas à déterminer l’intention la plus probable de l’attaque. Dans le cas du Monde, il s’agissait probablement de s’appuyer sur l’événement du congrès fondateur pour affirmer son positionnement anti Bayrou, en adoptant une démarche polémique et provocatrice à la fois plus nette que celle du Figaro et que celle de Libération. Cette surenchère pariait à la baisse sur la popularité de Bayrou dans son lectorat, et contribuait en même temps à cette baisse, si possible. Je vous donne ça comme première hypothèse, qui a au moins le mérite de la vraisemblance. Mais pour mener une bonne risposte, il ne faut pas se contenter de la première hypothèse qui vient à l’esprit. Cela demande des informations et de l’analyse.

Il ne s’agit pas du tout d’exclure toute initiative de réaction individuelle, avec son inspiration, son style. Nous sommes libres. Mais s’il s’agit d’actions collectives, elles ont besoin de conseil et de soutien, d’une part, et elles doivent répondre à des principes d’action et à une orientation stratégique, d’autre part. J’insiste un peu là-dessus parce qu’on peut faire des erreur monumentales dans le genre commando. En particulier si on mélange mon 1 et mon 2 avec le 3. On si on oublie qu’agir en commando, cela demande de l’entraînement, de la discipline, et de l’organisation.

4. Autre aspect de la question : il faut voir comment les médias perçoivent et interprètent les discours et les interventions des dirigeants de notre Mouvement. Il le font de manière critique, ce qui est leur rôle. Si cette fonction n’était pas assumée, nous serions toujours sous l’Ancien Régime. Nous devons apprendre à évaluer correctement le sens et la force de ces critiques. C’est ce qui permet de nous corriger, de nous améliorer.

Il me semble que la plupart de nos accusations tournées vers les médias procèdent d’un sentiment d’impuissance ou de résignation qui s’est retourné en tentative d’exploitation médiatique de l’échec. C’est bien évidemment une conduite d’échec, un cercle vicieux qu’il faut rompre.

5. Pour finir, et sans avoir fait vraiment le tour de la question, il y a nos propres médias, et notre propre manière de communiquer, entre nous ou vers extérieur du Mouvement. Là aussi, il y a beaucoup à faire.

J’ai deux expériences récentes à proposer en exemple. Deux fois où, sur e-soutiens, une intéressante question de communication s’est posée, à propos du maniement de certains arguments, et où s’est manifestée la difficulté énorme à laquelle nous allons être confronté en cette matière. Comme vous le verrez, ces questions engagent énormément d’affectivité.

Mon dialogue avec alexa dans e-soutiens.bayrou.fr/montrons_leur

Mon dialogue avec mamiep dans e-soutiens.bayrou.fr/demission_du_parlement_europeen

Là aussi, il y a un énorme travail de formation qui s’impose. L’école ne nous a pas bien appris à argumenter. Elle nous a appris à nous exprimer. Il en résulte que notre démocratie n’est pas délibérative. Elle est d’opinion. Faire de la politique autrement, cela implique, je crois, un changement dans l’usage que nous faisons de la parole, vers moins d’expression d’opinion et plus d’arguments délibératifs, tournés vers l’action. Ce qui à mon avis m’implique pas du tout, je le précise, le moindre changement de vocabulaire.

J’ai cru pouvoir faire le tour, Marie-Pierre, mais non. Mettons que dans notre situation particulière, ce sont des points importants, à ne pas ignorer, et à ne pas confondre.

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