Méfiance

Le Mouvement Démocrate existe bel et bien depuis le 9 mai 2007. Le dépôt en préfecture est annoncé dans le Journal Officiel daté du 12 mai 2007. Mais cela fait près de six mois que son existence reste irréelle, en effet. Parce que, depuis six mois, elle a été soigneusement maintenue dans l’irréalité. Largement de quoi user la patience de ceux qui sont bien décidés à en faire un mouvement réel.

Délai à comparer aux trois mois qui ont suffi pour que des militants mettent en place les forum, wikis, journaux, blogs, groupes de travail collaboratif, annuaires, etc. qui font que ce mouvement irréel existe. Les outils tiennent lieu d’organisation. Les affinités, les principes et les buts partagés tiennent lieu de statuts. Les réseaux tiennent lieu de fichier. Le temps passé tient lieu de budget. Et tout le monde tient lieu de président.

Sans compter tout ce qui s’est passé sur le terrain, là où les conditions étaient favorables. Ce mouvement irréel a fourni les trois quart de la main d’oeuvre de la campagne législative, sans broncher, campagne pourtant conduite entièrement hors de leur influence, que ce soit pour les investitures, les alliances, ou la communication.

En dépit de cela, les préjugés restent intacts. Mépris envers ceux qui ne viennent de nulle part, méfiance envers ceux qui viennent de quelque part.

Nous sommes toujours le troupeau irréel de naïfs et de déçus que nous étions il y a six mois. Les uns manipulés par les autres.

Citation:
Il est regrettable de constater que la discorde provienne principalement de personnes ayant déjà fait partie d’un mouvement …

De quel mouvement ? Pas de l’UDF, bien sûr. La discorde, à l’UDF, on ne sait pas ce que c’est. Des ruptures, on n’en a jamais vues. L’autodestruction, on ne connaît pas. C’est vraiment la paille et la poutre.

Quitterie Delmas, je le précise, vient de l’UDF.

Franchement, je trouve que nous nous sommes montrés particulièrement stoïques, de ne perdre ni notre patience, ni notre bonne humeur, aussi bien devant le paternalisme destinés aux naïfs que devant la méfiance à l’égard des déçus.

Non, on ne va pas se fâcher. Au contraire. Si tout parvient finalement à tenir ensemble et à aller dans le même sens, cela ne peut venir que de nous. Nous n’en avons aucun pouvoir, mais nous en avons toute la responsabilité. Telle est la situation. C’est ce qu’il faut bien comprendre. Faute de quoi, sans le vouloir, nous allons très rapidement nous détruire mutuellement.

La méfiance est un sentiment parfois justifié, mais dangereux : il engendre souvent la réalité qu’il prétend avoir perçue. Il est souvent de l’ordre de la “prophétie auto-réalisatrice”. Les six derniers mois démontrent à quel point ce sentiment peut finir par produire précisément ce qu’il a commencer par craindre faussement.

Cela vaut pour les deux côtés. Des préjugés, il y en a aussi, à l’égard de l’UDF, chez les adhérents du MoDem. Age, croyance religieuse, idéologie périmée, inefficacité, absence d’inspiration, fanatisme envers le chef charismatique, etc. En tout cela, nous montrons de l’intolérance, de l’inculture, de l’ignorance. L’UDF a une histoire, une et même des cultures, de l’expérience, et des idées. Cela mérite notre intérêt et notre respect.

A ces préjugés s’ajoutent des erreurs graves : je le répète, nous avons besoin des élus de l’UDF. Ils sont une composante cruciale de notre capacité stratégique. Nous avons en outre besoin d’une aile droite. Sans elle, notre liberté de manoeuvre à l’égard de l’UMP, aussi bien défensive qu’offensive, sera quasiment nulle.

Or notre avantage stratégique réside de toute évidence dans notre position centrale. Si nous ne pouvons l’exploiter que d’un seul côté, il s’anéantit.

Bref, notre potentiel, qui est immense, réside dans notre dualité (il ne faut pas oublier Cap21, mais je simplifie). Cela dit, notre capacité d’autodestruction, qui est non moins grande, réside elle aussi dans cette dualité.

Pour faire court : nous avons besoin de gens qui savent jouer le jeu politique classique, mais aussi de gens capables de le subvertir, en misant sur des formes de démocratie assez étrangères à ce jeu. Car comme parti classique, nous serions, sans ces derniers, pour toujours très inférieurs aux deux autres partis, et dans l’incapacité de rivaliser avec eux.

Nous n’avons plus beaucoup de temps pour en prendre conscience et pour en tirer toutes les conséquences sur le plan de l’action.

Si nous voulons que cette dualité devienne autre chose qu’un duel mortel, il va falloir lui trouver une articulation solide, le temps de s’accorder sur l’organisation, les buts, et la stratégie.

Il me paraît très peu probable qu’une forme ou une autre de fusion puisse tenir lieu d’accord, et encore moins d’articulation. Le consensus a priori qu’elle suppose est une illusion malsaine. Pour s’accorder, il faut d’abord négocier. Et si nous n’existons pas réellement, comme dit jeanmi17, nous ne pouvons rien négocier.

Il faudra donc être très fermes, et proposer au congrès une alternative provisoire à la fusion. Laquelle ? Des gens ont des idées : confédération, Constituante. Il faut y réfléchir. Et se souvenir que si tout le pouvoir est toujours d’un seul côté, au bout de six mois, toute la responsabilité, du même coup, est de l’autre. La solution ne peut venir que de ceux qui n’existent pas.

Je trouve assez navrant d’avoir à le dire : je ne viens d’aucun parti politique. Je ne suis transfuge de nulle part. Je ne suis déçu de rien. J’étais là où je suis, comme bien d’autres parmi nous, longtemps avant que l’UDF et Bayrou nous y rejoigne. Bien d’autres qui, comme moi, ont pourtant de l’expérience, associative, professionnelle, ou autre, qu’on aurait tort de sous-estimer. Et qui ne s’en servent pas si mal, si j’en juge par la méfiance qu’ils inspirent. D’ailleurs, n’est-ce pas du côté des vrais professionnels de la politique qu’on doit chercher ceux qui, en cette matière, sont les meilleurs juges ?

Je suis totalement solidaire, cela va sans dire, de ceux qui viennent d’un autre parti, et je me trouve assez lâche, au fond, de dire que ce n’est pas mon cas, comme pour me disculper, alors que je mesure tous les jours à quel point leur formation de militant et leur pratique est précieuse pour notre mouvement. Mais il fallait bien montrer à quel point, en toute bonne conscience, on se trompe, sur les sources de discorde, et où ça peut mener.

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